L'odeur de mes seins ...
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Quand on me les a posé sur le ventre, entre les seins très exactement ; j'ai vu leurs toutes petites narines se dilater et un apaisement soudain gagner les plis de leurs visages . Ils ont arrêté de crier .
Quand on me les a posé sur le ventre, entre les seins très exactement ; j'ai vu leurs toutes petites narines se dilater et un apaisement soudain gagner les plis de leurs visages . Ils ont arrêté de crier .
J'ai perçu l'odeur du bonheur qui traversait tout leur corps .
L'odeur du bonheur c'est l'apaisement, ni plus ni moins .
L'excitation, le manque, la peur et la rage font place à la sérénité, par inspirations lentes en quelques secondes précieuses .
J'ai adoré être témoin de la vie qui s'installe paisiblement et cela dès ses premiers instants avec le nez .
C'est incroyable de penser que ce sont les premières senteurs qui peut-être déterminent en partie pour tout le restant de l'existence, notre patience ou notre impatience, notre caractère insatiable ou non, nos peurs, nos cris, nos colères, nos doutes, nos calmes aussi, nos désirs ... nos rêves .
Et ça m'a fait sourire que l'odeur du bonheur ça soit un peu moi, à ce moment là . Ca m'a beaucoup plu !
Je me suis sentie quelqu'un de très très important et quand on a des doutes, vous comprendrez aisément à quel point l'odeur, le parfum de soi est fondamental ; comme de l'estime retrouvée en quelque sorte . Comme une nécessité de poursuivre un peu .
A chaque fois, bien sur, je me suis sentie fatiguée, épuisée même, en nage ; mes cheveux collaient à mon crâne ; mon corps me semblait moite, je tremblais, j'avais un peu froid ; rien de très extraordinaire, sauf l'odeur justement surprenante et inhabituelle ... et pourtant !
L'effort était passé mais les traces olfactives qu'il avait représenté me semblaient un tantinet génantes pour les autres .
Et puis non, bien au contraire .
J'ai bien vu que l'odeur du bonheur se nichait sur mes seins à chaque fois .
Ca m'a fait rire, rire , rire de joie .
La senteur merveilleuse qui comblerait longtemps leurs peines et tourments ; je pensais être devenue ça, comme un enchantement . Mon corps, tiraillé, vidé, douloureux, étrange s'effaçait dans ma tête pour laisser place au fondamental : mon odeur .
J'ai perçu mes bébés comme des douces bêtes et ma poitrine comme un refuge sans fin, comme une caverne, comme un lit douillet et chaud et tendre, comme un mouchoir charnu et doux .
Agressés par le latex des gants qui les avaient aidé à s'extirper de moi, agressés par l'odeur des champs de coton qui avaient ôté les quelques traces de sang de leurs crânes, agressés par les émanations sordides des désinfectants nombreux et obligatoires de la salle, agressés par tant de senteurs artificielles, et par le bruit et la lumière, il se sont calmés soudain, nichés entre mes seins en me reniflant .
Ca m'a plu , ça m'a plu d'être devenue une odeur, une simple odeur de bonheur inqualifiable .
Je crois, que mes propres narines se sont effacées pour ne pas sentir le mélange des produits pharmaceutiques qui imprégnaient tous les coins de la pièce .
Ce que nous , adultes, nous percevions alors, était sans importance finalement .
Le seule chose qui comptait, à ce moment là, la seule chose qui importait plus précisemment pour moi c'était d'être perçue comme une odeur salvatrice, sublime, aimée, unique .
Etre mère, c'était être sentie, ni plus ni moins , humée, reniflée jusque dans les rêves , tout simplement .
C'est cette évaporation d'amour, après le long travail de la naissance qui ne peut pas trahir l'enfant . Il l'aime et elle aime le sentir .
N'importe quelle femme est à ce moment là, absorbée par la complicité naturelle entre son parfum et le nez de son nouveau-né; l'un cherchant l'autre jusqu'à l'abandon .
On en perd tous nos sens .
tant eux que nous . ça chavire .
tant eux que nous . ça chavire .
On ne se sent pas bien ? On se cherche, on respire ensemble et nos peaux nous rassurent autant que nos seins le font à travers leurs narines ; le cycle de l'amour c'est notre odeur commune, mêlée à notre joie, nos attentes et nos pleurs . Ca nous ennivre .
Et eux, les nouveaux-nés, nous réconcilient immédiatement avec notre animalité; ils nous permettent soudainement, rien qu'à travers le frétillemment des leurs petites narines, de comprendre que oui, rien n'est meilleur que notre propre odeur .